OEIL : la pollution lumineuse cartographiée en Nouvelle-Calédonie

OEIL : la pollution lumineuse cartographiée en Nouvelle-Calédonie

La liste des pressions environnementales en Nouvelle-Calédonie est longue et, parmi elles, figure la pollution lumineuse. Afin de l’évaluer, d’identifier les zones à enjeux et de formuler des recommandations à l’attention des gestionnaires, l’Observatoire de l’environnement en Nouvelle-Calédonie (OEIL) a coordonné, de 2021 à 2023, un projet collaboratif inédit de caractérisation de la pollution lumineuse à l’échelle du territoire : Pollux NC.

Pollux

Multiplier les sources de données pour affiner les analyses

Cet état des lieux reposait sur l’acquisition d’images satellitaires, d’une part, et de mesures faites au sol, d’autre part : 

  • Les premières sont des données satellitaires gratuites de la Nasa issues du capteur VIIRS-DNB embarqué sur les satellites SUMI NPP et NOAA-20. D’une résolution de 750 mètres, elles permettent de produire des cartes annuelles des émissions moyennes de lumières artificielles à l’échelle du territoire sur une chronique de données qui s’étend de 2014 à 2021. Huit cartes ont été produites dans le cadre du projet, permettant un premier niveau d’analyse de la distribution spatiale des émissions lumineuses, et de leurs évolutions temporelles. Cette couche a ensuite fait l’objet de croisements avec de nombreuses autres sources de données dans une analyse thématique des niveaux d'exposition à la pollution lumineuse par type d’enjeu écologique et par périmètre administratif à différentes échelles.

 

  • Les secondes sont des images à très haute résolution (1,5 mètre), payantes, issues de la constellation de satellites chinois Jilin, acquises sur la période de réalisation du projet, soit 2021 et 2022. Ces images ouvrent la possibilité d’un niveau d’analyse au lampadaire près, particulièrement intéressant lorsqu’il s’agit, par exemple, de gérer un parc d’éclairage. Malgré des difficultés à obtenir des images de qualité la nuit en plein épisode La Niña, trois zones prioritaires ont bénéficié de leur acquisition : 

- Le continuum urbain en pleine croissance de Païta-Dumbea-Mont-Dore, grâce au financement du programme BEST2.0+ de l’Union européenne, porté par l’UICN,

- La ville de Nouméa, grâce à son financement spécifique qui est venu compléter les images précédentes pour couvrir le Grand Nouméa dans sa totalité,

- La zone de Koumac-Kaala-Gomen, grâce au financement spécifique de la Société Calédonienne d’Ornithologie (SCO), qui a souhaité étudier le niveau d’exposition des populations d’oiseaux marins de la zone.

 

  • Enfin, des mesures de terrain de la luminance du ciel nocturne ont été effectuées depuis le sol sur six sites en Nouvelle-Calédonie, grâce à des sondes spécifiques développées par la société DarkSkyLab, appelées « Ninox ». Ces sondes sont équipées d’un Sky Quality Meter orienté vers le ciel. Ce capteur mesure automatiquement la luminance du ciel nocturne tout au long de la nuit en se déclenchant au crépuscule lorsque le soleil atteint un angle de 8° par rapport à l’horizon, et en s’arrêtant à l’aube, lorsque le soleil atteint le même angle. Ces mesures réalisées de manière autonome, environ toutes les minutes, permettent d’échantillonner un lieu donné durant plusieurs semaines et fournissent des informations complètes sur la qualité du ciel nocturne. Ces données complémentaires ont fait l’objet d’un partenariat avec le Centre National d’Etudes Spatiales (CNES) et ont permis notamment de valider la pertinence des données issues d’images satellitaires.
Pollux

Des images satellitaires aux cartes modélisées

Les données des deux sources satellitaires utilisées sont des données de radiance, c’est-à-dire de puissance lumineuse par unité de surface et d’angle solide (elle se mesure en W.m-2.sr-1). Les cartes de radiance obtenues en premier lieu devaient donc ensuite être traduites en cartes de luminance zénithale, ce que permet le logiciel de modélisation Otus, développé par la société DarkSkyLab. 
La luminance, c’est la brillance du ciel nocturne. Elle s’exprime en magnitude par seconde d’arc au carré (mag/arc.sec2). C’est une mesure logarithmique dérivée de la magnitude photométrique, inspirée de la vision de l’œil humain et largement utilisée en astronomie.
Dans l’interprétation des mesures de luminance, les valeurs les plus élevées correspondent aux brillances les plus faibles. Ainsi, l’échelle d’évaluation de la pollution lumineuse s’étend de 17 à 22 mag/arc.sec² où 17 correspond à un ciel de grande ville, très pollué, et où 22 correspond à la référence dénuée de toute forme de pollution lumineuse.

Pollux

Des résultats éclairants, et une feuille de route à suivre

Les résultats de l'analyse ont révélé que 68 % de la superficie terrestre du territoire est épargnée par la pollution lumineuse, qui s’exerce principalement sur trois pôles correspondant à l’agglomération urbaine de la capitale et aux grands sites industriels et miniers du pays. Le groupe de travail, composé d’une centaine d’acteurs, locaux et nationaux, experts ou concernés par cette thématique, a formulé 18 recommandations d’actions sous la forme d’une feuille de route à destination des parties intéressées du pays. Parmi elles figurent l’adoption d’un arrêté territorial spécifique aux nuisances lumineuses, et la mise en œuvre d’un suivi dans le temps de la pollution lumineuse et de ses évolutions.
L’ensemble des résultats et recommandations sont disponibles dans le rapport final de l’étude, vulgarisés dans une brochure destinée au grand public et un tableau de bord (dashboard) sera très prochainement mis en ligne pour permettre à chacun d’explorer la donnée géographique produite, et d’en visualiser les informations sous la forme d’indicateurs et de graphiques.
Pour tout savoir du projet Pollux NC, de ses financeurs et contributeurs, rendez-vous sur le portail d’information environnementale de l’OEIL.